Robert Pollard. On ne le sait que trop bien, Robert Pollard est l’un des plus grands boulimiques de la musique de son temps, un Piero Scaruffi qui aurait troqué son stylo par une guitare.
Son dernier album en date, le 26ème sous son nom, se nomme Faulty Superheroes et vient de paraître le 28 avril dernier via Fire Records / GBV Inc. Il contient 12 morceaux pour une durée totale de plus de 30 minutes. Chris Keffer, qui a travaillé sur tous ces derniers albums ainsi qu’avec les early Black Keys (époque “Magic Potion“) est au mastering. L’équipe était donc au grand complet, Pollard et son génie inépuisable, Keffer aux manettes et le label de Guided by Voices en renfort. Il n’y avait donc plus qu’à.
Comme à l’habitude, ces nouvelles créations de Pollard sont brutes et rejettent tout l’enrobage pop qui habille 98% de la scène. Pollard a toujours fonctionné de la sorte, que ce soit avec Guided by Voices ou durant sa carrière solo. C’est, à mon sens, la raison première pour laquelle il restera dans la postérité.
Sans déroger à la règle, la première écoute de Faulty Superheroes est difficile. On pourrait penser qu’à force d’écoutes nos oreilles se forgent au son de Pollard, mais il n’en est rien. Et puis, tous les titres de Faulty Superheroes ne sont pas du même niveau. Si la constante est que le son de l’album est toujours imposant, on notera avant toute chose Faulty Superheroes n’est que peu similaire aux albums mythiques de GBV. “Photo Enforced Human Highway“, par exemple, est un morceau pop rock, une très belle pièce du genre auquel Pollard ne nous a habitué que sur la fin de GBV (reformation exclue).
Je ne pensais pas pouvoir m’y faire, mais l’introduction de “What A Man” me paraît à présent être un classique de Pollard. “Faulty Superheroes“, le titre éponyme, me fait penser à ce que serait une création rock’n’roll de Calvin Johnson. “Photo Enforced Human Highway“, pour sa part, nous ramène une nouvelle fois sur les roots du rock alternatif. Le refrain est à mon sens le meilleur de tout l’album. “Take Me To Yolita” fait partie des rares morceaux de l’album à rester en tête. Hit pop de ce Faulty Superheroes, il est idéalement placé en milieu de maquette, de quoi nous faire pivoter gaiment sur la deuxième moitié de l’album.
On fait alors le constat, une fois encore, que les albums se Robert Pollard sont à ce point bruts qu’ils pourraient servir de points de départ aux autres musiciens. Des titres comme “Up Up And Up” en sont un bon exemple : qu’on le donne à Pavement, à Sonic Youth, à Wavves ou Deerhunter, ils sauront tous quoi en faire et le résultat sera forcément réussi. Robert Pollard, muni de sa pelle, continue de creuser la ‘réserve mélodies’. “Bizarro’s Last Request” (Pollard qui parle de bizarre, on aurait donc tout vu) est un titre plus introspectif, plus touchant et plus incarné que certains autres qui font honneur au sous-titre de cet LP, Auto-Stop Mechanism. L’album se conclut sur “Parakeet Vista“, un titre fantasmagorique. La formule voix / guitare acoustique fonctionne toujours aussi bien.
L’aspect ‘démo’ est voulu et revendiqué, (en apparence), Pollard n’a jamais voulu passer trop de temps en studio, surement de peur de dénaturer ses créations. Alors certes, Faulty Superheroes n’est pas son meilleur album, mais il n’en demeure pas moins qu’il contient une part de son génie. Il ne sert à rien de se le cacher, le son de Pollard n’est pas destiné à une large audience. Pollard est simplement l’un des plus grands créateurs, l’un des plus prolifiques également, et il en restera toujours ainsi, un de ces ovnis qui inspire et inspirera les musiciens avant de transcender les foules. Robert Pollard est s’ils sont si peu nombreux à l’imiter, c’est précisément parce que sa musique relève d’un exercice d’équilibre. Entre tubes pop et démos lo-fi, Pollard a toujours su comment convaincre les aficionados d’un son un brin expérimental et un brin tubesque.
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