Nazz était un groupe de rock’n’roll américain formé à Philadelphie en 1967. Auteur de trois albums (Nazz (1968), Nazz Nazz (1969) et Nazz III (1970), tout droit parus chez Rhino), le groupe fait partie de ces quelques oubliés de la grande décennie rock’n’roll, et ce n’est pas les Nuggets qui ont remédié au problème.
Le nom du groupe, tiré d’une chanson des Yardbirds (“The Nazz Are Blue“), dit déjà beaucoup de ce que sont les Nazz : un groupe super sixties. Pourtant, les influences se font nombreuses dans la musique du groupe : on y trouve bien évidemment une énorme influence de la British Invasion, de la scène ala Jimi Hendrix, mais aussi du glam rock (façon Thunders), de la power pop (façon Big Star), groupes seventies. Nazz, qui ne s’est jamais cantonné au message des majors qui imposaient à l’époque que les artistes se limitent à un seul et unique genre dans le but de créer une identité forte, fait la parfaite liaison entre les deux époques.
Si l’on peut aujourd’hui coller l’étiquette de psych rock à la musique de Nazz, il est en réalité difficile de le faire sans se dire que l’on passe alors à côté d’une large partie de ce qui a fait ce groupe. Une volonté disruptive habite certes l’ensemble des créations de Nazz, mais il faut soulever à quel point Nazz était également un groupe à la recherche de hits, un de ceux que l’on écoute lorsque l’on a envie de riff faciles et explosifs.
“Open My Eyes“, le titre introductif, reste à ce jour le morceau le plus connu de toute la discographie de Nazz. Très influencé par la British Invasion, il fait place à une pop à single. Il y a du Who, du Kinks et du Hollies. On notera l’excellente reprise de ce morceau par King Gizzard and the Lizard Wizard pour le compte de la Nuggets: Antipodean Interpolations of the First Psychedelic Era.”Back Of Your Mind” est bien plus rock’n’roll, il fait partie de cette famille des titres de Nazz très proche de l’univers de Jimi Hendrix (et, accessoirement, Tame Impala). Je parlais de Glam Rock en introduction, en voilà également un morceau précurseur. De là à dire que Hendrix a probablement donné naissance à ce mouvement, il n’y a qu’un pas que je franchis. “Wildwood Blues” s’inscrit dans la même lignée, et cela vaut également pour “Lemming Song” (que Hendrix rougisse sur le final) et “She’s Going Down“. Il y a du Cream ainsi que du Blue Cheer pour l’aspect plus psychédélique. Les Nazz visaient souvent un son très loud, significatif de cette période de pre-hard rock, comme à la frontière entre garage et seventies.
“See What You Can Be” est plus Beatle-esque, pas forcément ce qu’il y a de plus intéressant dans la discographie de Nazz. Le prochain est d’une tout autre nature. Raison d’être de cet article anachronique, “Hello It’s Me” (merci à Humdrum Hippies pour le recall) est à mon sens le grand chef d’oeuvre de toute la discographie de Nazz. La force du refrain rappelle effectivement les grands moments de Big Star. La double accentuation sur le mot “free” lui un élan fabuleux. Et finalement, il y a fort à parier que toute la carrière de Todd Rundgren dépende de ce morceau. Enfin, “If That’s The Way You Feel” tire sur le psychédélisme de Rainbow Ffolly. “Crowded” fait également appelle à plus de pop psychédélique. C’est le retour des grandes mélodies sixties. L’influence de 13th Floor est évidente.
Que tirer de tout ça ? Nazz n’est pas un album révolutionnaire qui a forgé des générations entières. Pourtant, il prend place dans notre série d’articles “anachroniques” (en tant que 26ème album issu des sixties, ce n’est pas tant) en ce qu’il a su s’écarter du grand défaut des albums de la décennie : l’homogénéité programmée. Nazz est arrivé chez son label avec deux démos en main, “Open My Eyes” et “Hello It’s Me“. Ces deux morceaux demeurent les meilleurs du groupe. Quoi de plus logique, après tout, ils sont précurseurs de l’anti Blank Generation, là où les managers n’avaient pas pu faire leur travail d’aseptisation. Un peu comme le “Hot Burrito #1” des Flying Burrito Brothers, Nazz nous aura donné l’un des meilleurs morceaux de la décennie, un hit pour l’infini. Au final, on écoute Nazz lorsque l’on a envie de cette alternance entre les sons heavy de “Back Of Your Mind” et de la proto-power pop de “Hello It’s Me” et “Crowded“. Le groupe détient assurément quelques morceaux qu’une bonne discographie ne saurait manquer d’avoir.
(mp3) Nazz – Hello It’s Me (1968)
(mp3) Nazz – Open My Eyes (1968)
Bonus :
(mp3) Nazz – Lemming Song
(1968)
Liens afférents :
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Lien vers TOUS les articles anachroniques
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