Guided by Voices. Ça y est, c’est décidé, je ne présente plus Guided by Voices. Pour un panorama complet de la carrière du groupe, cliquez ici, et pour ses récentes émanations, cliquez là. Ne pas chroniquer Guided by Voices serait un peu comme ne pas parler du patient zéro. Robert Pollard est un pionnier, pionnier dans le rock lo-fi, pionnier dans la musique indépendante, pionner dans l’expérimentation. Alors, lorsqu’il annonce la sortie d’un nouvel LP, il est un devoir d’y consacrer quelques lignes, au moins.
Please Be Honest est le 55ème album du groupe (ça calme). On se souvient surtout des récents (et très bons) Motivational Jumpsuit et Cool Planet, parus en 2014. Robert Pollard avait entre-temps décidé de sortir quelques albums sous d’autres projets (oh, juste une petite dizaine) et le revoilà sous le nom de Guided by Voices avec cet LP composé de 15 morceaux. On se demande alors s’il a décidé de tourner sa musique vers les Beatles, comme il le fait parfois, ou si un punk plus tranchant a emporté la mise. Réponses.
Qu’on se le dise, Guided by Voices a conservé ce même son lo-fi qui le caractérise. Aucun trick ici, il s’agit d’un véritable lo-fi qui n’est pas là pour feindre un je-m’en-foutisme rock’n’roll. “My Zodiac Companion” et “Kid On A Ladder“, les deux premiers, sont des morceaux pop rock qui nous plongent lentement dans l’univers de Guided by Voices. Il est vrai que les premières minutes sont à chaque fois surprenantes. Pour jouer au vieux con, je note que les technologies à disposition du moindre groupe ont tellement évolué qu’il est désormais possible de produire du lo-fi depuis sa chambre. Nécessairement, on se trouve moins confronté à un son quelque peu sali, ce que Guided by Voices nous a toujours proposé.
“The Grasshopper Eaters” est encore plus lo-fi, ce qui n’arrange pas son accessibilité, mais le côté mélodique fini par l’emporter. Guided by Voice fait dans un expérimental apaisé avec l’introduction des premiers accords de guitare sèche. Elle va revenir. Suit “Glittering Parliaments“, un titre plus pop qui rappelle ses créations des années ’90. “The Caterpillar Workforce” n’est pas moins bizarre, Robert Pollard qui s’essaie à la folk, c’est toujours particulier. “Sad Baby Eyes“, un thème que Guided by Voices a souvent abordé (la tristesse, pas l’enfance), est toujours aussi minimal. Pollard expérimente encore plus et l’on se sent perdu, il faut bien le dire.
Heureusement “The Quickers Arrive” nous ramène sur des terres plus abordables. On aime notre Guided by Voices lorsqu’il flirte avec de l’indie rock nineties, c’est ce qu’il fait parfaitement sur ces 3 minutes à retenir. Une chose est sure, la musique de Robert Pollard est toujours aussi noire. C’est ce qui ressort tout au long de cet album, à l’image de ce titre. Vient alors “Hotel X (Big Soap)” qui opère une véritable cassure, histoire que l’on ne puisse vraiment s’habituer à aucune dynamique. N’importe quel autre groupe aurait construit son album de la sorte que l’on aurait crié à la faute de gout, mais il est va bien différemment avec Robert Pollard. Ce titre-là débute façon bande-son de John Carpenter en alternant entre indie rock et refrains pop. C’est parfaitement déconstruit, du très bon Guided by Voices.
“I Think A Telescope” reprend les arpèges du titre précédent pour repasser sur de la folk. “Please Be Honest” enchaine, toujours avec la décontraction d’un SHR (à google-iser). C’est un peu la version Guided by Voices du terme “balade”, un truc un peu stressant où l’on court plus qu’on ne se promène véritablement. Guided by Voices a toujours voulu échapper aux arrangements studio qui plombent les créations, pari réussi.
“Nightmare Jamboree” a pour lui d’injecter un peu de punk dans cet album. C’est probablement l’un des meilleurs titres de cet LP. Si l’on aimerait parfois que les titres de Guided by Voices ne restent pas à l’état de démo, ce qu’ils sont toujours, on se dit que “Nightmare Jamboree” est très bon comme il est. “Unfinished Business” est plutôt indescriptible, alors on se reporte très directement à “Defeatists’ Lament“, l’avant-dernier. Cette fois-ci, Pollard semble avoir composé une musique de chambre. Sa voix est toujours autant sur le fil, ça fonctionne ! “Eye Shop Heaven“, enfin, fait ressortir une énième production, et une belle mélodie pour conclure un album encore plus décousu qu’à l’habitude.
Au final, Please Be Honest ne diffère pas beaucoup des autres albums de Guided by Voices en ce sens que Robert Pollard a une formule qu’il appliquera jusqu’à la fin, et c’est très bien comme ça. Dès lors, critiquer un album de Guided by Voices, au risque de se répéter, revient à apprécier les mélodies de chaque morceau, seul déterminant véritable de la qualité de ses LPs. Et elles sont ici nombreuses à être mémorables.
Full disclosure, les articles sur Guided by Voices sont loin d’être ceux qui suscitent le plus d’intérêt, et je persiste pourtant à penser que le groupe, légende en activité, mériterait beaucoup plus de lumière. J’espère que cette publication sera une bonne surprise, comme le fut l’article sur la musique indépendante japonaise dont je parlais déjà hier. Voilà, adviendra ce qu’il adviendra. En attendant, Guided by Voices, l’un des plus grands groupes indépendants de l’histoire, continue sa route vers la postérité.
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