Wavves est l’un des groupes les plus encensés de Still in Rock. Classé 3ème meilleur album de 2013, puis 5ème meilleur album de 2015, chacune de ses sorties est scrutée de près par les services de détection de Still in Rock (euh…). Pourtant, je me suis bêtement laissé influencer par mon entourage spécialisé qui, quelques jours avant la sortie de son nouvel album, m’a promis qu’il était bien trop mauvais pour qu’il faille y consacrer quelques minutes. “C’est du pop punk dégueu“, qu’ils disaient. “Wavves est mort“, l’habituelle.
Et puis, les jours passant et le shuffle de mon iTunes ayant décidé de me replonger dans King of the Beach, je me suis dit que l’expérience méritant quand même d’être tentée. Après tout, Nathan Williams a délivré de nombreux chefs d’oeuvres tout au long de ces dernières années qui, à mon sens, n’ont jamais eu la reconnaissance qu’ils méritaient d’avoir.
Bingo, c’était donc faux ! You’re Welcome est un album très Wavves qui, certes, accentue sa plongée dans la pop music qui n’en demeure pas moins intéressante. Tout n’est pas à prendre, c’est un fait, mais ce qui doit l’être mérite votre plus vive attention, d’une intensité au moins équivalente à celle que donne John Belushi aux dortoirs d’Animal House.
“Daisy“, le premier morceau, est déjà meilleur que 90% de ce qui se fait en matière de surf punk. Ce titre pourrait être de King Of The Beach que personne ne serait choqué. Nathan Williams laisse toujours autant de place à la partie vocale, ce que seule une très bonne production peut lui permettre. Les premiers palmiers californiens que je décrivais à l’occasion de Afraid of Heights commencent à apparaître dans le fond.
“You’re Welcome” fait partie des essais plus pop de cet LP. Le titre est décousu, on comprend la volonté de Nathan Williams d’expérimenter un peu au-delà du punk habituel, mais je ne crois pas que ce morceau parvienne à ses fins. Il est probablement trop saccadé. “No Shade” – une référence au groupe français ? – joue le punk british qui durcit le ton, mais on comprend que Wavves ne départit pas véritablement de son univers baseball.
“Million Enemies” fait partie des excellents morceaux de cet album, ceux que pour lesquels je curieux d’entendre une critique constructive. La raison ? Le fun ! Le fait est que le riff de “Million Enemies” est efficace, que Nathan Williams s’évertue à crier sur ses ennemis dans un élan punk & pop, enfin, que la production est toujours aussi bien faite.
“Hollowed Out” jouit d’un refrain particulièrement eighties. Et puis, ça gronde, voilà du Wavves en puissance ! “Come To The Valley“, comme il le faisait déjà sur King of the Beach, renoue avec le cheesy qu’il semble tant aimer. Le titre fait office d’interlude à la Dumb & Dumber.
“Animal” fait peut-être partie de ces morceaux dont le refrain est moins bien trouvé, c’est dommage tant les couplets parviennent à s’extirper du reste de l’album. Big up (je devais le placer) pour le passage vocal. Délivrer quelques secondes de ce calibre pour un punk, c’est un peu comme parler de son père pour un rappeur.
“Stupid In Love“, quant à lui, est de ces morceaux qui ont déclenché tant de scepticisme à l’égard de You’re Welcome. Il faut dire que la production est un brin trop présente et qu’elle ne laisse pas assez place à la musique. Wavves semble vouloir en jouer avec, dénonçant lui-même sa propre bêtise, mais on peine à se laisser convaincre malgré le chorus. Tout l’inverse se passe avec “Exercise“. Le titre est fidèle à l’univers de Afraid of Heights et me fait me questionner sur la bonne foi de ceux qui aiment décrier cet album. Ça cogne là où il faut, quand il faut, voilà bien du vrai punk US dans tout ce qu’il peut produire de meilleur.
“Under” est limite. On l’écoute avec plaisir un jour d’été à trainer sur son vélo mal huilé, mais je ne suis pas certain de son degré d’accessibilité un lundi matin grisonnant. Quant à “Dreams Of Grandeur“, il vise juste sur tous les tableaux. Le refrain embarque cette pop que Nathan Williams poursuit, sa voix est parfaitement dédoublée et l’on se dit que le bordel sera complet aux côtés de Fidlar, Audacity & co… Nous connaissons le titre depuis janvier 2016 – la faute aux Ghost Ramp Monthly, il n’a rien perdu de sa superbe !
Et “I Love You” d’être l’une des raisons du caractère positif de cette critique. Le titre fait ce que Wavves veut tenter depuis trop longtemps : une chanson d’amour dans un élan très 70s. Le cheesy est à son comble, preuve que Nathan Williams n’est pas tombé dans la marmite sans le faire exprès. You’re Welcome a parfois des allures de rock college, et c’est ainsi qu’il l’a voulu. “I Love You” fera les pieds à tous ceux qui pensent que punk = bro’.
Au final, si You’re Welcome en est dessous de ses précédents albums, on y trouve pas moins le fun californien avec lequel Wavves sait si bien jouer. On espère, certes, qu’il renoue prochainement avec le punk de skateurs de ses débuts – enfin, de King of the Beach… – mais ne jetons pas la planche de skate avec l’eau de Californie.
Après tout, il est toujours difficile de se positionner vis à vis d’un groupe qui a produit l’excellent. Cet album de Wavves serait le premier LP d’un nouveau groupe australien qu’il serait discuté dans tous les garages de France. Seulement voilà, You’re Welcome est le fait de Wavves, un groupe capable de quelques masterpieces. On s’en retrouve logiquement un peu déçu, en dedans. Il contient pourtant certaines pièces qu’il faudra compter parmi les titres les plus divertissants de l’année. C’est bien là ce qui caractérise cette musique, sa capacité très américaine à nous jeter plein la vue, parfois un peu trop, mais qui fonctionne malgré tout. Ecouter You’re Welcome, c’est un peu comme lire Hubert Selby Jr. – et son Retour à Brooklyn. L’auteur en fait un poil trop, l’écriture perd en consistance, mais la capacité d’entertainment est indéniable et… inimitée en France.
1. Daisy
2. You’re Welcome
3. No Shade
4. Million Enemies
5. Hollowed Out
6. Come To The Valley
7. Animal
8. Stupid In Love
9. Exercise
10. Under
11. Dreams Of Grandeur
12. I Love You
Post a comment