Album Review : Fuzz – Fuzz (Garage Stoner)







Album Review : Fuzz

Fuzz

Fuzz. Cet album était l’un des plus attendus de l’année. Il faut dire qu’un nouveau groupe de Ty Segall est toujours un événement qui secoue le monde du Garage. De plus, Ty a la très fâcheuse tendance de ne jamais décevoir. Et cet opus est au-dessus de bien des attentes. Ty ajoute une nouvelle pierre à son édifice qui compte à présent plus d’une dizaine d’opus magistraux. Au risque de me répéter, il est plus que jamais le premier prétendant au titre de meilleur artiste des années 2010′. 
Fuzz est un album pathologique. Une fois encore, la musique de Ty nous rapproche du jugement dernier. Une fois encore, nous jouissons de ces résonances ténébreuses. Enregistrés au boulevard des allongés, Ty et Charles Mootheart délivrent huit titres pour un maximum de ténèbres. Fuzz est l’opus qu’écoute en boucle Astaroth, une création pour (de ?) l’antéchrist. Ces morceaux atteignent un tel niveau de créativité que l’on a bien souvent la sensation de ne pouvoir résister à l’écoute de l’opus en entier. La faute n’est pourtant pas à une jouissance de tous les instants.
Il faut dire que Ty Segall et Charles Mootheart se connaissent bien. Le dernier cité était autre fois leader de Moonhearts. Il avait depuis rejoint Ty sur son opus Melted, ainsi que le Ty Segall Band sur Slaughterhouse. Roland Cosio s’est ajouté à Fuzz il y a peu. L’équipe ainsi formée, Fuzz a fait paraître quelques EPs par-ci par-là et ce premier opus sortira le 1er octobre sur In The Red Records. Plus In The Darkness que dans le rouge, il est temps de se consacrer à la critique track-by-track :

  • Earthen Gate : Que ça fait plaisir d’avoir à écouter un titre introductif réellement pensé pour. “Earthen Gate” tient sa place avec brio. Ce morceau donne un bel aperçu de ce à quoi s’attendre avec cet opus : de longs solos de guitare, un son de batterie très sec, et toujours cette même voix qui bercent nos nuits depuis maintenant 4 années.
  • Sleigh Ride : Les cavaliers Ty and Charles accélèrent la cadence. Nous voilà voyageant à très vive allure sur ces fuzz qui n’en finissent jamais de secouer nos neurones. “Sleigh Ride” est un morceau qui gagne à être écouté de très nombreuses fois. C’est le Ty Segall version Slaughterhouse qui fait son apparition, pour trois minutes qui effraierons les plus délicats d’entre nous. Ah ça, il sera difficile de dire que la délicatesse est le principal atout de la musique de Fuzz. 
  • What’s In My Head? : A mon sens l’un des tout meilleurs titres de l’opus, “What’s In My Head?” est la réponse à “My Head Explodes” paru en 2011 sur Goodbye Bread. C’est finalement à l’image de Ty Segall : crier haut et fort une explosion puis en analyser la cause deux années plus tard. La mélodie de “What’s In My Head?” est un classique instantané et la guitare se trouve placée dans les Olympe du Garage. La dernière minute nous donne un bel aperçu de ce qu’ils écoutent tous en enfer en dansant au milieu des flammes. La damnation sera jouissive ou ne sera pas. 
  • HazeMaze : “HazeMaze” a assurément l’une des plus belles introductions de tout l’opus. On y entend tout le plaisir que prend Ty Segall à entonner ces quelques paroles. Peut être “HazeMaze” est-il plus long à convaincre, mais le résultat est toujours le même :  une incroyable envie de faire voler en éclat le monde qui nous entoure. Ty s’offre une des plus belles partitions de batterie, avec une guitare qui fait honneur aux Black Sabbath (à voir). La reprise à 4min09 est particulièrement léthéenne.
  • Loose Sutures : Le titre le plus surprenant de l’album. Après deux minutes qui préparent nos tympans au tout meilleur, la troisième minute vient introduire un fuzz que l’on n’avait pas entendu résonner de la sorte depuis bien des années. La deuxième partie de “Loose Sutures” est clairement plus expérimentale. Qui eut pu annoncer la présence d’un solo de basse sur un album de Ty Segall ? Ty et Charles nous défuntisent avec tant d’engouement que l’on accepte cette danse macabre avec sourire et excitation. Le spectre de “Loose Sutures” viendra hanter nos vieux jours.
  • Preacher : En plein dans les catacombes. On y voit passer toutes sortes de spectres, à vive allure, car le lieu est aussi noir que terrifiant. Fuzz met les pleins turbos, le dernier soupir s’approche à grands pas, et “Preacher” nous permet d’y rescaper le temps de deux titres supplémentaires.
  • Raise : Déjà 27 minutes que nous errons dans les colombaires de Fuzz, et pourtant, notre coeur y est toujours. Lorsque débute “Raise“, on avance dans un ossuaire où la musique de Fuzz continue de cogner chaque micromètre de nos tympans enflammés.
  • One : Il serait criminel de ne pas exulter lorsque l’on voit approcher ce dernier morceau, six minutes durant lesquelles nous savons que Fuzz nous a réservé du très grand. “One” est la fuite que l’on prend, nos dernières forces s’engourdissent dans un rythme trop soutenu pour que l’on puisse y résister. “One” finira par avoir raison de notre appétit de vie. Le fanatisme que l’on porte désormais à Fuzz est si grand que l’on ne peut plus qu’y succomber.

Difficile de ne pas conclure l’écoute de Fuzz avec les oreilles qui sifflent, criant l’envie d’une nouvelle agonie. L’aspect stoner de plusieurs titres rappelle les créations de Witch. Ty Segall est encore allé puiser au plus profond du Garage pour nous présenter un opus qui n’est pas sans son psychédélisme obscur. Notons que les différents titres dont nous nous délections avant cet LP son absent de la maquette.
Après son fabuleux album de Folk paru le mois dernier (Album Review de Sleeper), 2013 sera une nouvelle année Ty Segall. Nul problème à cela, nous demandons ‘simplement’ quelques dizaines d’autres albums de cet acabit afin d’assouvir un appétit funèbre sans fin. La brume tombait, et il lui semblait que les ténèbres humides, l’enveloppant, descendaient indéfiniment dans son coeur.

Post a comment

Your email address will not be published. Required fields are marked *