Article par P’tit
Un soir de Novembre, à ma porte, une platine vinyle est venue frapper. Depuis, je reste enfermé de longues heures durant et pose cet objet noir sur le tourneur. C’est ainsi que je me transporte dans ces contrées que, petit, ma mère me décrivait.
J’aime à me faire des scénarios de voyages, visiter les étendues où les artistes nous transportent quand retentissent leurs premières notes, interludes des doigts d’un magicien dont le son parcourt le bois verni d’un musicien. Ma livraison du matin est arrivée. Une pochette de 33 tours rectangulaire aux formes arrondis par le temps. De ce plastique d’un vert aqueux vieilli, j’ôte en premier “Jamaica Plaines“, disque précautionneusement enveloppé par ceux qui en cette fin d’année MMXIII respectent encore le peu de musique que nous héritons de nos paires, Sore Eros & Kurt Vile. A lui seul, le nom évoque ce coucher de soleil sur des plaines teintées de dorures éternelles provoquées par ces champs de chambres maquillés en chant de blé et résonne au travers de l’écho du vent et du grésillement du microsillon.
Robin Robinson et Kurt Vile dévoilent leur premier titre. Ils semblent grimper, aux dernières lueurs du jour, les marches rocailleuses d’un désert aux mille couleurs. Ces deux amis fidèles nous offrent une des plus belles vues du demi-jour, remède contre la médiocrité face à cette ligne d’horizon qu’est « Serrum ». Alors quand la nuit débute et que le crépuscule prend fin, on admire le travail d’un créateur qui nous aura donné à contempler et écouter ; cet esprit qui est le mien et qui achève son devoir sur « Calling out of Work ».
Les minutes passent, je ne me souviens plus, alors je fouille dans l’emballage et en tire un Long Play, celui de Kurt Vile lui-même. Son deuxième de l’année en réalité, après “Wakin On A Pretty Daze“. Bien qu’enregistré ensemble, ce dernier change mon univers de paix et de romance.
“It’s a Big World Out There (And I Am Scared)” reprend certains des morceaux de son prédécesseur, mais n’offre pas les mêmes émotions à partager. Là où avec mon ami je me promenais, je n’observe plus que crainte maîtrisée. “Fell my pain” décrit cette nervosité qui m’habite. Je comprends alors pourquoi je m’enferme depuis si longtemps à l’écoute de précepte de notes. Ce morceau est un vestige sorti d’une stase. C’est ma merveille, ma convoitise. Alors je m’effondre sur ce lit qui expose à ma vue des centaines de flocons de neige à peine formés. Au moment où sonne “Snowflakes Extended“, chaque frottement de la guitare me rappelle les frissons d’un froid de fin d’Automne. Bien loin de mes pensées, la reconquête des plaines de Jamaïque s’estompe peu à peu. Lorsque s’achève “(reprise reprise)“, je comprends enfin que ce monde que j’imagine si vaste dehors, n’est qu’une réplique de mon imaginaire, très tôt entretenu par cette douce musicalité.
(mp3) Kurt Vile – Feel My Pain
(mp3) Kurt Vile – Never Run Away (string synth)
Liens afférents :
Article de présentation de Kurt Vile
Album Review de Wakin On A Pretty Daze
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