Guides by Voices, c’est fini. Le groupe a récemment annoncé sa (nouvelle) séparation. Est-ce une raison de plus pour chérir Motivational Jumpsuit ? Absolument. Et n’oublions pas Cool Planet, l’autre album du groupe également paru en 2014. Mais avant tout chose, Motivational Jumpsuit mérite largement sa place dans le Top 10 de l’année parce qu’il est une nouvelle démonstration en force du talent d’un des groupes les plus cultes des années ’90. Je l’ai dit et redit, Guided by Voices est le plus grand créateur de mélodies de la scène. Ces mêmes mélodies ne sont jamais polies, ce qui fait de Guided by Voices un groupe qui ne ressemble à aucun autre et qui, surtout, a influencé bien plus que la très grande majorité des autres groupes de légende. Et dire que Motivational Jumpsuit est l’un des meilleurs albums jamais sortis par GBV…
Le meilleur album jamais composé par White Fence. For The Recently Found Innocent aura donné un nouveau champ des possibles à la pop psychédélique. Meilleur opus du genre paru depuis des années, on ne saurait être étonné qu’il soit l’œuvre de Tim Presley. Cet artiste fait partie des 3 ou 4 piliers de la scène, de ceux qui inspirent tout un monde, crées des vocations, stimulent des carrières. Des groupes se formaient au lendemain des concerts des Ramones, et d’autres se forment dorénavant au lendemain de ceux de White Fence. Toute la palette pop psychédélique se trouve réunie dans un opus qui marquera bien plus que cette année. Magnifique bouquet de fleurs, on y a trouvé la masterpiece d’une destinée.
Ty Segall est sans conteste l’artiste le plus adulé de tout ce classement. Et ça tombe bien, pour plusieurs raisons. La première, Ty Segall sera nécessairement le meilleur artiste de la décennie. La seconde, Ty Segall crée du rock’n’roll, pour le rock’n’roll, au service du rock’n’roll. Ce nouvel opus, Manipulator, en a surpris plus d’un (à juste titre) mais il est finalement une nouvelle expression de cette possession de l’artiste, au service de la musique qu’il a toujours aimé. Ty Segall, c’est le génie par excellence, le créateur sans fond, l’homme que tout le monde adule, car il nous permet de nous élever de notre condition. Le monde est peut-être mal fait, mais tant que Ty Segall sera adoré de tous, j’aurai foi en l’humanité. Rien de moins.
L’ovni de ce classement 2014. Alex Calder était déjà présent dans le classement 2013, et le revoilà maintenant dans le Top 5. Mais comment aurait-il pu en être autrement ? Strange Dreams est probablement Le meilleur opus de Dream Pop (ou, en l’occurrence, de Spectral Pop) que je n’ai jamais écouté. Je ne prends pas ces mots à la légère, Alex Calder est un artiste majeur de la scène canadienne. Pourtant, la presse peine encore à saisir le phénomène Alex Calder. On trouve en lui non pas la folie des grandeurs, mais la grande folie des artistes. Strange Dreams va reparaître en 2015 via Captured Tracks, et je prends d’ores et déjà les paris que cette année à venir sera majoritairement celle d’Alex. Rien ne sera plus mérité, sa musique est en tout point nouvelle, et en tout point géniale.
Television Man est un opus d’initiés, du genre de ceux que l’on retrouvera cités comme une référence absolue dans plusieurs années. Son aspect mécanique a de quoi déranger. Un peu comme Lester Bangs le disait, cette musique est à ce point anti-émotionnelle qu’elle en devient poignante. Finalement, Television Man est un chef-d’oeuvre artistique en ce qu’il suscite en nous l’envie de plus d’humanité. Je crois fondamentalement qu’il y a un avant et un après Television Man. Du genre d’albums dont on se souvient de la première écoute, il est ici avant tout question d’inconscient. Naomi Punk vient de délivrer une pièce artistique qui ne trouve aucun pareil dans aucune autre forme d’art. Un opus au service de l’Art ? Assurément !
Il est un des opus les plus jouissifs de ces dernières années. Un peu à l’image de Bret Easton Ellis, Total Slacker fait partie de ces émanations artistiques qui nous donnent précisément tout ce que l’on veut.
Slip Away est un album de grunge qui se veut comme tel. Mais avant tout, Slip Away est une question de jubilation, un état d’esprit. Il est vrai que sa puissance se révèle d’autant plus aux amateurs des années ’90. Et puis, critiquer cet album sans évoquer la force de ses textes serait incomplet.
Il y a finalement quelque chose de très communautaire dans la musique de Total Slacker. Comme un signe d’appartenance, je trouve une confiance toute particulière dans tous ceux qui ont encensé le groupe. J’y vois une apologie de la musique nineties, une apologie de ce que le rock’n’roll doit être, une franche partie de rigolade. J’y vois aussi la capacité à se détacher des médias et des mouvements de masse. A l’inverse, je ne peux m’empêcher de vouloir laisser de côté les classements qui n’évoquent pas cet opus. A quoi bon ? Total Slacker n’a eu que très peu de presses en 2014, et ne nous voilons pas la face : cela en a incité beaucoup à ne pas se plonger pleinement dans la musique du groupe. Il y a une déshumanisation de la critique musicale qui m’inquiète. J’en suis arrivé à suspecter toute critique d’être une réaction à une autre critique : une contestation parce qu’un média connu a encensé, une approbation parce qu’un autre blog indépendant a également donné son approbation. Total Slacker a donc échappé à tous ces méandres. Certes, Pitchfork a dénoncé tous les clichés de cette musique, mais quel meilleur signal qu’une détestation du site précité pour trouver un bon album. C’est justement parce que ce site de “critique” ne cherche qu’à dénicher ce que la hype va aduler qu’il est passé à côté de Total Slacker. En réalité, il faut voir plus loin que ces intérêts inter-critiques qui nous polluent tous. Total Slacker forme un ensemble qui promeut un style de vie idéalisé dans ses clips.
Cet album fait partie de ceux que l’on peut poser comme définition au rock. Il doit rassembler au-delà des intérêts, des mouvements, du cool et de la masse. Les Clash avaient réussi en leur temps à regrouper un ensemble sous la bannière du Punk. Mais peu étaient finalement ceux qui allaient vivre pour cette musique. Il n’empêche que cet ensemble était là et ne formait qu’un, en dépit d’une réelle appréciation musicale. Les Clash allaient au-delà, et j’exhorte, sans conviction je dois le dire, d’aller au-delà sous la bannière de Total Slacker.
2 Comments
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Anonyme
Ca fait plaisir de voir un tel classement. J'ai un peu de mal avec le son "lointain" de l'album de total slacker, je trouve qu'on entend mal les guitares, perso.. je prefère le son plus rude mais plus présent des naomi punk
bravo à stephen malkmus qui frappe une nouvelle fois très fort.
Anonyme
Slip Away, le seul disque que j'aurai voulu écouté, mais que je n'ai jamais trouvé sur le net. PSi quelqu'un a un lien… Pour moi, 2014 est aussi l'année de Meatbodies, Woods, Joy, Swans ou Jessica 93.