Butterglory était un groupe originaire du Kansas formé en 1992 dont l’histoire est quelque peu commune. Butterglory est le premier de l’histoire à avoir envoyé ses démos à Merger Records, sans avoir été recommandé par quiconque. A l’époque, Matt Suggs est inconnu et n’a pas vraiment le look d’une future rockstar, mais Merger décide de faire honneur à son statut de label indépendant et sort un premier EP en 1992. S’en est fini des démos faits à la main par les deux membres du groupe, Matt et Debby, alors amoureux et déterminés à intégrer la scène D.I.Y. des alentours de sa faculté.
Crumble est le premier des trois albums du groupe. Paru en 1994 via Merger Records, il reflète toute la force de la scène de l’époque. Butterglory, en effet, c’est un autre groupe “à la” Pavement. Il intègre cette classe de groupes d’indie rock qui jouaient de toujours plus de nonchalance. A la différence de Pavement, Butterglory est finalement terriblement ancré dans son époque. Et puis, il est également plus pop. Il n’en demeure pas moins que les ressemblances avec le groupe seront l’une des raisons qui auront permi au groupe d’être signé sur Merger, de l’aveu du label lui-même.
L’un des atouts (charmes) de Butterglory était Debby Vander Wall, chanteuse et batteuse du groupe. Peut-être le groupe n’a-t-il pas assez joué sur cet aspect de son identité. Peut-être Butterglory aurait-il occupé plus de compilations “Summer hits 94” s’il avait su mieux se marketer. Mais peut-être qu’on s’en fout de tout ça, au fond.
“Waiting On The Guns“, le premier morceau de cet LP, est l’un de ses meilleurs représentants. Pop, enjoué, mais néanmoins oisif, il donne une image assez fidèle de ce qu’est cet album, Matt et Debby ligués pour donner le meilleur de Butterglory. Vient ensuite “Forty-Four“, un morceau plus docile où Butterglory explore une partie du mystère nineties. “Cactus” joue l’alternance.
“Jinxed” est très Silver Jews. Ce titre est à lui seul la preuve de tout le potentiel pop du groupe. Butterglory tient là son meilleur morceau. “Peasants, Kings” vient ensuite se la jouer à la façon d’une démo. Et puis, vient “Trapped” qui a tout d’un titre de Pavement, de sa musique jusqu’aux cris du chanteur façon Stephen Malkmus. Le titre joue trop la ressemblance à mon goût, mais après tout, les groupes des années ’10 ne jouent-ils pas la ressemblance avec Ty Segall ?
“Summer’s Torn” redonne un peu de place à Debby qui avait introduit l’album. Surement est-ce, en partie, dû à l’influence assumée de Sonic Youth sur Matt Suggs. Butterglory fonctionne parfaitement lorsqu’elle a le lead, tout entier. “Summer’s Torn” s’écoute volontiers à l’occasion d’une petite balade de nuit, sur la plage.
“The Skills Of The Star Pilot” est également symbolique des titres d’indie rock de l’époque, toujours partant pour nous raconter une petite histoire improbable. Cette fois-ci, “il a les capacités d’un pilote d’exception”, demain, il mangera du gratin de courgettes. Butterglory est toujours autant désabusé, sensation d’une génération pommée sur fond de noise pop.
“He Left Us Nothing” est plus dur à appréhender, entre le titre instrumental façon Velvet et la démo Dinosaur Jr. “Those Mooney Stars” est plus abouti, un véritable plus de cet album. On y entend aussi, à mon sens, l’influence de la scène Flyin’ Nun qui semble apparaître plusieurs fois. “When We Sleep” répond au “I Need to Sleep” de Malkmus.
“Ring Finger” est plus ésotérique, en cela plus proche de Guided by Voices. “Our (Proud) Mascot” participe également de faire de la dernière partie de cet album un ensemble moins pop et moins mélodieux. Butterglory y est très bon, également. “The Drums Were Lost” conclut le tout. Le son de la guitare, toujours aussi métallique, pas de doute, Butterglory est de la décennie de Bill Clinton.
Au final, le cynisme de ses compo’ fait le beau jour du revival nineties que l’on vit actuellement. Butterglory nous rappelle une époque où le cool était dans l’apathie. C’est pour cette raison que les sons de Butterglory sont souvent langoureux et que les voix rivalisent d’indolence. Malheureusement, le groupe se séparera avant de trouver son public et il n’est aujourd’hui bien souvent qu’une simple mention dans les livres sur l’histoire du rock. Et pourtant, Crumble est un album qui ne souffre de presque aucun défaut. Chacun de titres à sa place, une franche réussite qu’il conviendrait de ne pas zapper.Certes, cette époque des années ’90 était bénie de dizaines de groupe extraordinaires (voir notre mixtape), et certes, Butterglory sera toujours dans l’ombre de Pavement et d’une poignée d’autres groupes nineties, mais il n’en demeure pas moins que les 15 morceaux de Crumble sont excellents. Tachons de leur donner une nouvelle vie. Plutôt que de se reporter toujours à la nouveauté constante, des groupes peu connus à l’image de Butterglory méritent bien plus leur place sur nos platines.
(mp3) Butterglory – Waiting On The Guns
(mp3) Butterglory – Jinxed
Liens afférents :
Article sur Pavement
Article sur la mixtape Sitll in Romck 1985 – 1995
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