Garageland était un groupe néo-zélandais (label Flyin’ Nun, forcément) formé en 1992 qui a fait paraître trois albums, dont Last Exit To Garageland en 1996. Et c’est un chef-d’oeuvre, véritable. Très inspiré de Pavement, on y retrouve ce même état d’esprit qui a depuis complètement disparu de la surface de la Terre. Il y a un maximum d’ironie, un cool slacker, plus de nonchalance que le Big Lebowski et le brin de punk noisy et grunge qui rappelle sa décennie.
C’est comme ça que l’on imagine Garageland, qui tire son nom des Clash – voyez, le punk : avec des fringues trop large, un blue jean destroy, des Dr. Martens qui ne prétendaient rien, une coupe au bol, une chemise à carreau SUR le t-shirt trop grand, ouais, Still in Rock se transforme en pages mode. Si je plante ainsi le décor, c’est que je m’amuse de lire ces articles sur le normcore naissant alors Malkmus et compagnie avaient déjà déterminés les codes du genre. Et une fois encore, rien n’est feinté, ici. Le souci du paraître est écarté de l’équation, ah, on est loin du temps de nos chers Strokes qui a réintroduit le calibrage rock’n’roll. Garageland a traduit l’esprit nineties mieux que personne en Nouvelle-Zélande.
La version originale de Last Exit To Garageland est composée de douze morceaux, mais il y a plus sur la version Foodchain Records de 2003. Et je ne saurai trop vous encourager de vous procurer cette dernière, les huit titres ajoutés sont d’une excellente facture. Parce que ça fait beaucoup, néanmoins, je ne parlerai ici que de la crème de la crème, le Crooked Rain, Crooked Rain sur le gâteau nineties, la Kim Gordon sur le Thurston Moore.
“Fingerpops” surprend, d’entrée, parce que Garageland est off tune, que l’instru’ rappelle cet indie rock 90′ jamais trop éloigné du grunge et que le groupe ne semble pas craindre d’être trop démonstratif. “Classically Diseased” est bien plus pop, c’est ici que la première comparaison avec Pavement doit être faite, surtout pour ce qui est de la section rythmique. Et “Beelines To Heaven” de compléter le trio introductif avec ce même cool blasé.
Oh, mais Garageland n’est pas un incurieux. “Come Back” nous dit son génie créatif avec l’un des grands hits des années 1990′. XX, en réalité, est une sorte de méga-compilation des singles du groupe. Ce dernier avait vu le jour en 1995 à l’occasion de l’EP Come Back Special. Il est depuis devenu l’indispensable de toute bibliothèque (anti)-sérieuse en matière de son nineties. Le titre déferle comme Tarantino sur le gore. Et “Nude Star” de perpétuer cet élan, toujours plus proche de Pavement, toujours plus grungy, toujours plus saturé. Everybody, given up. “Fire Away“, enfin, vient nous dire que la face B sera tout aussi snappy.
“Tired And Bored” – un hymne pour ces années-là – vient dire à Beck qu’il n’est pas le seul à être revenu de tout. Garageland donne toujours plus de fucked up sur “I’m Looking For What I Can’t Get“, ce titre devrait être enseigné dans toutes les écoles de garage rock du monde. “Never Gonna Come Around Here Again“, quant à lui, ne laisse transparaitre aucune volonté de baisser l’intensité 90s, Garageland utilise tous les codes de l’époque au service de ces mélodies Nirvana-esque.
“Return To You” nous dit que Garageland sait chanter – on note, “Jesus I’m Freezing” nous dit que le groupe a froid et “Underground Nonsense” résume l’époque, ou la nôtre. Ce dernier morceau est également très révélateur de ces temps là, comme Pavement le disait, l’ère du rock’n’roll était finie, on n’avait plus besoin de nous. On retrouve ici cette conscience historique qui explique, à mon sens, pourquoi les groupes de l’époque étaient si détachés du big game.
Au final, Last Exit To Garageland est l’un des plus grands albums de la décennie. Il est, aussi, un absolu classique du rock indépendant, l’oeuvre maîtresse néo-zélandaise, l’un des pics de cette génération de rockeurs. Le DNA de Still in Rock se trouve caché dans ces quelques accords. Garageland montre comment délivrer une musique pleine d’excellentes idées sans pour autant réfléchir à son concept qui doit s’imposer de lui-même. C’est ce que fait TH da Freak, aujourd’hui. L’héritage de Garageland – qu’il soit assez connu ou pas – est bel et bien vivant. Cette génération a tout fait. La nôtre doit tout refaire (ceci est un nouveau style de conclusion, plus grandiloquent).
(mp3) Garageland – Come Back (1995)
(mp3) Garageland – Bus Stops (1996)
Tracklist : Last Exit To Garageland (LP, Flying Nun Records, 1996)
1. Fingerpops
2. Classically Diseased
3. Beelines To Heaven
4. Come Back
5. Nude Star
6. Fire Away
7. Tired And Bored
8. I’m Looking For What I Can’t Get
9. Never Gonna Come Around Here Again
10. Return To You
11. Jesus I’m Freezing
12. Underground Nonsense
Liens :
Article sur Pavement
Lien vers tous les articles anachroniques
Post a comment