Cela fait plusieurs années déjà que je suis déçu par Wand. Son premier album, Ganglion Reef, était paru en 2014 et avait fait honneur à la scène Ty Segall de l’époque. Depuis, Wand avait délivré Golem et Plum (en autre), et c’était… pour le moins expérimental. Le groupe semblait perdu. Il avait le mérite de vouloir se démarquer de la foule garage, mais semblait ne pas trouver la voie. J’avais ainsi interviewé le groupe à la fin de l’année 2017 (lien), persuadé d’y capturer le groupe dans ses derniers instants de gloire. Je m’étais trompé.
Le 19 avril dernier, Wand est revenu avec son cinquième album studio, Laughing Matter. Paru sur Drag City, il pourrait bien constituer le meilleur LP jamais publié par le groupe. Wand sort de sa psychanalyse et délivre un album parfaitement balancé, sans PTSD. Son livre de chevet est désormais Boris Vian, il ambitionne aussi la lecture de Oscar Wilde et des hédonistes. Ça lui change du DSM (pour les non familiers, Diagnostic and Statistical Manual of Mental Disorders).
En toute quiétude, Wand délivre des morceaux qui jouent sur un même contraste : la voix apaisée de Cory Hanson vs. une instru lourde et pesante. Si “Scarecrow” est trop fluet pour convaincre, la formule apparaît dès “Xoxo” (avec son fort côté Damaged Bug). En réalité, l’album est trop long (15 morceaux pour 1h10), on laissera donc de côté les titres trop délicats, je pense à “High Planes Drifter“, “Thin Air” et “Airplane“. A l’inverse, Wand est assurément brillant lorsqu’il délivre une musique écrasante. “Walkie Talkie” est un véritable rouleau compresseur, “Wonder” rappelle les guitares de son premier album, crunchy à souhait, et il y évoque ses “panic attacks screaming in your head”. Voyez.

Vient ensuite “Evening Star” qui pourrait bien être la majuscule de cet album. Si son introduction a de quoi laisser sceptique, ses aspects post-apocalyptiques ainsi que sa deuxième moitié en roue libre font de Wand le groupe de garage psyché le plus abouti de la scène actuelle. Ce morceau encapsule tout le travail accompli par Wand qui, depuis plusieurs années déjà, s’est engagé dans une recherche difficile. “Evening Star” est l’accomplissement d’une démarche osée. Elle fera de Wand un groupe dont on se souviendra. “Luckys Sight” est un dernier coup de massue. 

Au final, Wand délivre ici un album tout à fait singulier (c’est rare, eh oui). Si la couleur dominante est le gris, foncé qui plus est, Wand se fait l’auteur de quelques-uns des meilleurs moments de 2019. Les albums qui en détiennent un seul méritent toute notre attention, mais lorsqu’ils sont nombreux, il faut constater l’évidence : un nouvel album pour la décennie vient de paraître. Wand s’est soigné, Wand s’est trouvé, Wand peut désormais avancer vers des sonorités torturées sans nous donner l’impression de souffrir pour autant. Ah, psychanalyses…

Tracklist: Laughing Matter (LP, Drag City, 2019)

1.
Scarecrow
2.
Xoxo
3.
Bubble
4.
High Planes Drifter
5.
Walkie Talkie
6.
Thin Air
7.
Hare
8.
Wonder
9.
Evening Star
10.
Tortoise
11.
Rio Grande
12.
Airplane
13.
Lucky’s Sight
14.
Wonder (II)
15.
Jennifer’s Gone

Liens :

Post a comment

Your email address will not be published. Required fields are marked *