Voici l’histoire. Il y a quelques semaines de cela, je reçois un e-mail sur ma boite Still in Rock : un groupe me propose d’écouter son nouveau single. Ce groupe, c’est Basic Shapes. J’écoute ; ça me plait bien. Je réponds. Il me répond. Quelques semaines passent ; je reçois un nouvel e-mail de sa part : l’album est désormais disponible. Après quelques secondes d’écoute, je lui confirme mon intérêt. Me voilà donc prêt à rédiger une brève pour l’intégrer dans l’un de mes articles Delusions. Le moment venu, je me consacre donc à l’album pour la première fois : casque sur les oreilles, IPA sur un coin de la table, seul dans l’appartement, samedi, 18h. Ouais, ça me semble être le bon moment. Je clique play et je commence à écrire.
Si je vous raconte tout ça, c’est parce que c’était avant, avant que je n’entre pleinement dans l’expérience Basic Shapes. Ce n’est pourtant pas faute d’avoir adhéré à son message dès nos premiers échanges. Originaire de Montreuil, il me disait vouloir envahir l’Australie. C’est pour cela qu’il fait paraître son album sur deux labels. Le premier est Polaks Records, un label français qui s’est fait remarquer en 2018 pour avoir sorti le bientôt mythique New Age de Vintage Crop. Le deuxième, c’est Weather Vane Records, un label Aussie également connu pour travailler avec Vintage Crop. Et Moth.
Ce que je n’avais pas perçu, c’est que Clockwork Organs fait tantôt dans le garage punk, tantôt dans le post-skate. Les Basic Shapes n’hésitent pas à aller chasser sur les terres de Melbourne, faisant de lui le premier groupe (partiel) de post-skate français.
Dès “Mechanical Parts“, Basic Shapes délivre un premier coup de poing à la Tony Dork. Le titre est furtif, nerveux, noirâtre, bagarreur. Vient ensuite “Credo“, le début de la phase australienne. La guitare est davantage tournée vers le surf et la batterie assume le rythme d’un morceau de garage rock. C’est toutefois trop bien produit (et quelle production !) pour être véritablement garage, ouais, Basic Shapes est destiné à une autre scène (vous me voyez arriver…). La voix est délicieusement parlée, le tout s’embale sur un BPM qui accélère dans la deuxième phase du morceau…
“No Creep” scelle le deal. C’est MONSTRUEUX. Tout est post-skate ici, des paroles anti-corporation jusque dans l’exécution avec cette guitare de l’après post-punk. Basic Shapes a truffé son album de mélodies à fait rougir un Uranium Club bien inspiré. “Homeless Talk” le laisse apparaître une fois encore, sous la dominante d’une guitare anglaise. Oh, et puis, allez jeter un oeil au p’tit dernier, “Nigh Train“. Lui aussi tend vers l’exceptionnel. Si vous avez un jour versé quelques goutes de sueurs à l’écoute d’Eddy Current Suppression Ring, ça devrait faire l’affaire.
Et maintenant, l’exode ?
Je pose donc la question : va-t-on désormais assister à un exode australien ? Je me suis amusé à questionner plusieurs groupes sur le match Australie vs. USA ces derniers mois, et les uns comme les autres sont restés très prudents :
- PRIORS: “Australia will always be the place to look for the best rock n roll. There is no contest.”
- PINCH POINTS: “Australia has a rich music history and Melbourne definitely seems like the centre of music culture here at the moment.”
- ABORTED TORTOISE: “From my viewpoint, a lot of stuff that’s doing well in Australia right now is directly derived from that Midwest weirdo internet punk scene, so the Americans probably come out on top if there was a hypothetical “battle”. Some bands are putting a more original spin on that sound than others.”
- PERSONALITY CULT: “I’ve never heard of any battle! Australia rules, though.”
- TONY DORK : “Melbourne has such a strong music community with so many good bands and venues that you can see amazing bands every night of the week. The whole Australian scene is insane with so many new bands popping up all the time and that it’s hard to keep up.”
Ouais… trop prudents, même. Seulement, si j’écrivais en décembre dernier que le match pouvait tourner court (article) avec un essoufflement australien, force est de constater que 2020 EST une année australienne. L’heure pourrait bien être désormais à ce que Melbourne et ses alentours imposent leur style musical au reste de la scène, ou plutôt, qu’ils parviennent à convaincre de la nécessité post-skate. Alors oui, le Canada est également très fort en matière de post-skate, et on ne peut donc pas dire que ce style de musique soit uniquement rattaché à l’Australie, seulement, les groupes Aussie ont pour eux cet aspect super fun que relevait Tony Dork. Si je vois le moindre groupe canadien bouger dans cette direction, je crierai sur tous les toits que l’Australie est en train de conquérir le reste du monde. Il ne m’en faudra pas moins. Basic Shapes sera alors le premier à avoir marqué la chose, ce qui ne fera jamais que rajouter à l’importance de son premier album. Voilà.
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