Anachronique : Country Joe and the Fish (Psych Rock)

 

Country Joe and the Fish était un Woodstock band, oui, mais voilà, pas n’importe lequel. Formé à Berkeley en 1965, il s’imposera très vite comme l’un des leaders / principaux créateurs du son de San Francisco. Le groupe est, à l’origine, un simple duo constitué de Country Joe McDonald et Barry “The Fish” Melton. La rumeur dit qu’il n’aurait été un temps le simple side project au journal anti-guerre du Vietnam de McDonald, j’ai nommé Rag Baby. Qu’importe, après tout. Le fait est que Country Joe and the Fish est aujourd’hui le symbole de beaucoup de ce que l’on aime dans le rock’n’roll.

 

Le groupe était l’un des meilleurs représentants du rock psychédélique de l’époque, mais il était également un prétexte au rassemblement anti-Vietnam, je cite : “le nom du groupe lui-même annonce une certaine politisation : Country Joe était le surnom de Joseph Staline pendant la Seconde Guerre mondiale, The Fish ferait référence à une citation de Mao Zedong (« L’armée doit être dans le peuple comme un poisson dans l’eau »).“.  Peu de chanteurs se seront trouvés sur la “enemies list” de Richard M. Nixon. C’était le cas de McDonald, parce que trop contestataire. Surtout connu pour sa chanson anti-guerre des années ’60, “I Feel Like I’m Fixin’ to Die Rag“, le groupe ne peut être réduit à cette folk sixties finalement assez pop. Country Joe and the Fish était en réalité affaire de psychédélisme, d’expérimental et de musique électronique, un véritable pilier. On retrouve ainsi ses titres dans de nombreuses compilations, je pense à la The California Scene in the ’60s, à Next Stop Is Vietnam 1961-2008Vietnam: Songs From the Divided House, Nuggets from the Golden State, Songs of a Psychedelic Age, ainsi que tout ce qui touche de près ou de loin à Woodstock.
Le groupe fera paraître son premier album en 1967, Electric Music For Mind And Body. Il constitue, à mon sens, le seul LP qu’il faille considérer. “Flying High” est un excellent morceau, le premier de cet album et également l’un des plus mémorables. Empruntant au blues ce qu’il faut pour créer un rythme sensuel, il se dénote des autres morceaux par sa guitare tranchante. “Not So Sweet Martha Lorraine“, le second, est probablement ce pour quoi nous connaissons aujourd’hui Country Joe and the Fish. Premier single du groupe, il lui aura permis de se faire remarquer, d’avoir un label pour soutien et, finalement, d’avoir fait l’histoire.
L’avant-gardisme du son de “Death Sound“, le troisième morceau, m’étonnera toujours. La scène garage post-Jay Reatard peut l’en remercier. Il regorge pourtant de ses solos sixties comme plus personne n’en fait aujourd’hui. C’est l’un des grands indispensables de la discographie de Country Joe and the Fish, il serait impensable de se réclamer fan de rock psychédélique sans y avoir consacré quelques dizaines d’écoutes !
Quant au plus long titre de tout l’album, il se nomme “Section 43“. Strictement instrumental, il participe de constituer l’une des pièces majeures de cet LP, de celles qui lui auront donné ses lettres de noblesse dans la contre-culture psychédélique de l’époque. Les jams de ce genre étaient chose rare à l’époque, remercions Country Joe and the Fish d’avoir enfanté White Fence & co.
Sans conteste, “Love” est le titre qui donne le plus de place à la voix de Country Joe McDonald. C’est l’un des grands classiques de cette discographie.

Et puis, le groupe s’essayait parfois au lyrisme de l’époque, c’est le cas sur “Bass Strings“, de ces classiques romantiques de sixties qui auront enfanté Vanilla Fudge… On attend l’explosion, mais ce sont finalement les riffs acerbes qui distillent l’énergie dont nous avons besoin. “The Masked Marauder” se veut également très dynamique. Et puis, “Grace” est le petit dernier, sorte de titre épique de plus de sept minutes qui est introduit de la sorte : “Cold rain to splash water diamonds colored green and Flash the sun to paint green her hair“. J’ai déjà eu l’occasion de le dire, mais quoi de meilleur que ces titres épiques des années ’60 et ’70, à une époque où les groupes osaient la mise en scène, osaient nous conter des histoires au coin du feu.

Au final, Electric Music For Mind And Body fait partie de ces rares albums de l’époque à nous présenter différents univers. Le groupe avait tout particulièrement fait preuve d’ingéniosité. Si la deuxième moitié est plus lente que la première, j’y vois une volonté de nous faire entrer en pleine conscience, petit à petit. Faites l’expérience, attendez la nuit tombée, augmentez le son et vivez seul l’expérience Country Joe and the Fish.

On se retourne également à chaque écoute de Electric Music For Mind And Body sur la qualité de l’enregistrement. Que dire lorsque l’on entend le son de “Death Sound” sinon que rien n’a changé depuis lors. Country Joe and the Fish avait tout, le songwriting, un son parfaitement saturé, des mélodies ensorcelées et la voix exceptionnelle de son leader. Nul doute qu’il demeure aujourd’hui l’un des grands noms de Woodstock et toute cette génération bénie.

 

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