Damaged Bug, c’est le projet analogico-electronico-acide de John Dwyer, leader des Saints Oh Sees. Il vient de sortir son deuxième LP sous ce nom, encore et toujours via Castle Face (son label).
Il y a priori de quoi être méfiant. Dwyer est bien connu comme étant l’ultime leader américain de la scène rock’n’roll. Alors, qu’il décide de se pervertir dans un autre exercice semble être une idée bien saugrenue. En réalité, Dwyer ne peut pas véritablement se trahir, et même lorsqu’il abandonne ses copains de scène pour s’enfermer dans sa chambre et composer de la pop sous acide, Dwyer nous rappelle que sa puissance est là, planquée dans un coin de pénombre.
Premier constat à l’écoute de Cold Hot Plumbs, on a rarement l’habitude d’écouter des albums de la sorte, et ça, ça fait du bien. Savoir que l’on va être surpris à chaque nouveau titre qui démarre est la meilleure des sensations. Dwyer le fait si bien avec les Oh Sees qu’on ne pouvait s’attendre à autre chose sur un autre projet. Deuxième constat, le son de cet opus est très noir. Comme pour les Oh Sees, Dwyer parvient toujours à délivrer une ambiance inquiétante, qui nous rappelle que ça tourne probablement plus en triangle que rond dans sa tête.
Alors certes, on retrouve le John Dwyer de
Drop sur certains morceaux, comprenez là le Dwyer stressant avec une musique volontairement irritante, à l’image de “
Cone“. Mais, déjà, “
What Cheer” est un bel exemple de ce que les Oh Sees peuvent avoir comme influence sur une autre scène que la leur. Et puis, c’est le morceau qui suit qui doit être le plus pris au sérieux. Les deux batteries de “
The Mirror” mènent ce titre à la baguette. Probablement meilleur morceau de cet LP, il trouve à mon sens le parfait équilibre entre sonorités analogiques – ce qui donne sens à l’existence de ce projet alternatif – et éléments rock’n’roll.
“Jet In Jungle“, pour sa part, nous transporte dans un espace plus aride que la forêt qu’il décrit. L’enchaînement avec “Der Mond” est efficace, on vient donc de trouver la tribu qui se cachait derrière les branches. Vient alors, “Cough Pills” irrésistible pour son rythme qui vient casser avec les deux morceaux qui le précédent. Surement est-ce le titre le plus pop de tout l’album.
Malheureusement, la deuxième moitié de l’album est moins bonne. “Grape Basement” passe à côté de son sujet et “Mega Structure” a le don d’agacer. Le final, avec “Transmute“, est relativement serein. John Dwyer aime à nous faire croire qu’il se serait assagi. Tu ne nous auras plus John, on connaît ton petit jeu. J’en profite d’ailleurs pour signaler avec quel plaisir on écoute un John Dwyer puissant, disruptif, un John Dwyer qui nous écrase les tympans. Pour de la Bedroom pop, adressons-nous à Ultimate Painting.
En somme, et c’est tout de même une surprise, cet album regorge de bonnes idées et de titres bien pensés qui nous accompagneront longtemps. Ce n’était pas gagné d’avance, d’autant plus que les Oh Sees viennent de faire paraître leur meilleur LP (article). Je profite de cet article pour signaler que Tame Impala aurait bien fait de ne pas se croire capable de ce que Dwyer vient de réaliser, car les premières émanations électroniques du groupe ne sont pas à la hauteur de leurs deux premiers LPs (mais ça, j’y reviendrai plus longuement). En attendant, vive Dwyer, et vive le Bug Endommagé !
(mp3) Damaged Bug – The Mirror
(mp3) Damaged Bug – Cough Pills
Liens afférents :
Live Review de John Dwyer à la Villette
Album Review de Mutilator Defeated At Last
Anonyme
"mais ça, j'y reviendrai plus longuement" Je sens qu'on va bien se marrer. Pond a été épargné mais Tame Impala va être froidement exécuté.